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Thill, Serge : En faveur d’une Loi constitutionnelle

Si des opinions publiés dans le contexte de la campagne affirmative ont pu soutenir que Français et Néerlandais se sont exprimés en fonction de thématiques autres que ce qui leur était demandé, les Luxembourgeois se trouvent maintenant confrontés au problème contraire que l’enjeu a fini par dépasser le choix posé. Faut-il revigorer l’élan référendaire des six pays en état de suspension, conférer à leurs pouvoirs respectifs le courage d’oser quérir l’intelligence de leur souverains, et comment vont-ils réagir à des encouragements en ce sens provenants de notre pays ? Ou simplement faire notre part du devoir pour contribuer à faire passer la barre des vingt ratifications afin de forcer le conseil européen à s’occuper du patient faute de quoi il aurait la cruauté de le laisser mourir de faim ? Ou encore définitivement faire table rase afin de permettre au processus de repartir sur de meilleures bases ? Et dans ce cas d’une hypothétique renégociation est-il plus avantageux à l’issue du processus de ratification d’avoir voté oui pour se trouver en position de force, ou est-ce l’inverse qui est vrai ? Parmi tant d’incertitudes, il est rassurant que nos députés ont statué qu’il est certain que la problématique soit trop passionnante pour qu’il faille déchirer nos convocations et entreprendre le jour J de chasser le poisson. Le suivi des campagnes et la lecture engagée du Traité ont contribué à former l’opinion contenue dans le titre. Deux réflexions centrales en fondent l’argumentaire.

La nature du travail parlementaire est mieux adapté à produire un texte équilibré et consensuel accepté comme tel par l’électeur qu’une proposition conventionelle revue et corrigée par vingt cinq ou plus exécutifs en charge de leurs intérêts perçus à l’instant de la session du conseil. Une majorité même des défenseurs du texte convient qu’il contient des passages de moins bien.

A l’inverse d’un contrat qui ne peut être que révoqué ou renégocié à l’unanimité des parties impliqués, un texte législatif peut être doté de procédures d’amendements taillés sur mesure, que qui le rend plus apte à réaliser la formulation de la Constitution dans la durée. Et quoi qu’on en dise, il est concevable que ce fait aussi atteint la conscience de l’électeur, soit-ce indirectement, et que la perspective d’une dictature de la Constitution ne l’enchante pas.

La réplique habituelle à ces idées proposé entre autres par ATTAC Luxembourg [1], que je remercie pour l’inspiration fournie, est que cela est bien gentil, mais qu’il est pas permis de penser que vingt cinq gouvernements renoncent ensemble à un tel pouvoir, (p.ex. [2]) alors que jusqu’à présent la destinée du processus engagé amène plutôt à douter de la réalité du pouvoir en question. L’échec antérieur d’une procédure analogue n’amoindrit pas cette impression, vérifie l’adage que les mêmes causes tendent à produire les mêmes effets et le fait qu’il a fallu plus d’une génération et demie pour reprendre le flambeau fait peur. Se pose aussi la question ce qui a conduit les États-Unis à exiger la création d’une constituante en Irak dans un contexte similaire par les aspects relatifs à l’écriture d’une constitution, alors qu’un texte provisoire avait déjà été établi, pour ne pas dire convenu, et à sacrifier vies et argent en quantités considérables afin de maintenir ce processus en état. Le non français a dégagé une opportunité pour militer dans ce sens au terme du processus de ratification lors du décompte annoncé des pertes et profits, invitant à consacrer quelques lignes à la topologie de l’illusoire et du réalisable [3] en cette matière.

La pièce angulaire d’un scénario possible serait un Traité européen d’autorisation qui décrit les pouvoirs et les obligations d’une assemblée élue au suffrage universel dans le but de procéder à des lectures et des travaux parlementaires en vue d’établir une oeuvre législative répondant au critères d’un cahier des charges qui détaille les aspects de souveraineté. Seulement une minorité d’articles et de dispositions du Traité actuel engagent l’unanimité du conseil, et le travail d’harmonisation des compétences respectives entre corps législatif, conseil, et dans la mesure du nécessaire, d’autres organes de l’Union européenne apparaît beaucoup moins ardu et volumineux que les 482 pages sous débat. Et pourquoi ne pas convoquer un conclave, pardon, une Convention selon le mécanisme éprouvé, si cela peut assister la prise de décision du conseil. Il arrive d’entendre l’aveu de représentants de la campagne pour le non que le Traité soumis contient aussi du bon, constatations qui viennent à la rescousse d’efforts de lecture personnels. De plus ne sous-estimons pas les bienfaits dans l’esprit du lecteur qui a du mal à comprendre la relevance constitutionnelle d’énoncés de politique énergétique de la capacité ainsi créée de rendre à la fois à la Loi constitutionnelle et aux traités ce qui leur appartient.

Associer le corps législatif en tant que partie au processus contractuel, de façon analogue aux mécanismes de co-décision existants, est requis afin de favoriser la pleine application du principe de reconnaissance mutuelle, comme il est bien dit dans l’article III-260, de même qu’il est imaginable que la formulation de certains domaines le la Constitution nécessite aussi la majorité qualifiée du conseil. Aussi qu’on laisse le soin d’établir sa propre procédure d’amendement à la législative [4]. Organiser cela en un tout cohérent qui ne porte pas préjudice à une renégociation du Traité d’autorisation en cas de besoin ne semble pas sorcier, et d’après mes nouvelles le Luxembourg ne s’opposerait pas à une voie législative. Critiques ou propositions alternatives sont les bienvenues, et ce qui reste à lire sera explication des arguments de base.

ATTAC Luxembourg constate que le Traité n’est pas idéologiquement neutre  [5] et la lecture du texte décourage le doute de cette déclaration. Bien qu’il soit impensable de demander à une constitution de ne pas faire preuve d’idéal, son caractère fondamental et encadrant exige une formulation balancée et non conflictuelle de ces passages, interdit aussi de dépasser le nécessaire et d’empiéter sur des terrains où des lois simples, sinon des traités, s’avèrent suffisantes et plus adaptés. En particulier si cela concerne des thématiques qui sont centrales à et âprement débattues dans la plupart des campagnes électorales nationales et européennes comme les voies et méandres des politiques économiques. Si la présence privilégiée du domaine économique dans la construction de l’Union européenne est compréhensible et souhaitable eu égard à son évolution historique, il est une autre question s’il est productif d’essayer de marboriser les références d’économie politique des partis de pouvoir dans une constitution.

L’observation des campagnes antérieures a renforcé le sentiment que la perception de cette absence de modestie du texte nuit gravement à son adoption par des électorats en mal d’harmonie qui se sentent déjà victimisés par leurs mandataires [6], ainsi que par des manquements de démocratie ou autres dysfonctionnements de leurs systèmes politiques existants. Pire, des suspicions caverneuses liés aux pages noires de l’histoire européenne entretiennent le pressentiment qu’il n’est pas de trop de s’efforcer à rassembler l’ensemble de ce qui est communément désigné comme majorité civilisatrice, et qu’il ne sera pas possible d’y arriver en faisant fi des bases du vote rouge/rose.

Depuis l’invention de la séparation des pouvoirs il n’a pas été trouvé plus civilisé que la procédure parlementaire itérative à majorité qualifiée comprenant maison basse et maison haute pour établir des consensus larges et équilibrés qui dépassent les conventions exprimés par des influences momentanés tout en les intégrant dans l’accomplissement de leur fonction représentative.

Dans le souci de vérification pratique de ces théories, j’ai profité du bâton de pèlerin dont s’est doté la chambre des députés pour poser la question dans quelle mesure la stipulation d’une économie sociale de marché hautement compétitive peut contrecarrer ou empêcher des efforts politiques coopératifs ou multilatéraux ; en expliquant que le traité CECA a expressément supprimé la compétition entre ses signataires en reconnaissance entre autre du fait que la guerre peut être expliquée par la continuation de la compétition par d’autres moyens ; et en concrétisant la question sur les difficultés escomptés par l’application du principe mentionné sur l’action de l’Union européenne dans des thématiques engagés, respectivement à engager, au sein de l’OMC qui dépassent ou contextualisent la concurrence économique.

A titre de digression, l’acceptation que les relations et lois naturelles implémentent aussi toute une panoplie d’instruments autres que la compétition facilite la détection d’autres instances, aussi dans la science de l’économie humaine, p.ex. la monnaie, ce qui fait penser que la terminologie « écologique et sociale » est plus intégrative et complète du point de vue sémantique, quoique probablement moins comprise par la majorité des pouvoirs exécutifs actuels. L’adjectif «  efficacement » pourrait la précéder, par analogie à l’original. Par souci de complémentarité, il convient aussi d’indiquer que la substance de la réponse gracieusement fournie était que le Traité dispose de suffisamment d’attributs relativisant la portée combative de cette qualification pour prévenir les dangers précités [7]. Ailleurs mon ancien prof de français rappelle que l’article I-3 comporte cinq paragraphes :-) [8].

En résistant à la tentation de la réplique, le raisonnement se poursuit avec la constatation que la liste des griefs imputés à l’énoncé de la «  highly competitive social market economy » c’est avérée longue et qu’elle contient nombre d’arguments passionnés ou justifiables et qu’un processus parlementaire aurait été plus apte à détecter, puis à résoudre cette problématique pas à pas par nature du débat parlementaire et de l’écoute réciproque qu’il engendre à la plus grande satisfaction de tous les acteurs et électeurs dans le meilleur des mondes possibles. A ma connaissance les occurrences dans lesquelles est reproché au mécanismes du parlement européen un manque de capacité consensuelle se font rares. Les efforts requis pour faire aboutir cette procédure engendrent automatiquement la focalisation des énergies disponibles vers des complexes qui finiront par être perçus comme étant les plus essentiels et urgents.

En ce qui concerne le deuxième argument de base, la supériorité des potentialités de procédures d’amendement par rapport aux méthodes de rénégociation du Traité à capter et à exprimer modifications constitutives à échelles variables ainsi que approbation électorale semble tellement intuitive à la lumière des arguments précédents pour renoncer au développement d’une méthode de justification avant que la contradiction ne se soit manifesté, tout en admettant, réflexion faite, que le début de phrase mériterait d’être confronté à son sort, et qu’il doit bien exister plus qualifié que moi pour développer cette discussion.

Par malheur, toute cette panacée ne m’aide pas à déterminer comment voter afin d’obtenir une Constitution européenne par écrit et en bonne et due forme. Vaut il mieux avoir plus ou moins de vingt ratifications en fin de compte afin d’assister la réalisation de la voie à suivre dans les lieux utiles ? Un match nul de deux partout semble peu enclin à y faire obstacle, mais comme il n’est pas encore su si prolongation ou pas prolongation, ni si elle serait à mort subite ou pas ... et même le printemps d’Andijan, où on doit jeter des regards rêveurs vers le Bangladesh, se met en travers de la tentation de jeter l’éponge et d’aller consulter de plein gré le juge de paix historique des ambitions européennes.

Enfin permettez moi d’étendre mes sympathies aux auteurs de forum-referendum.lu qui ne sont même pas payés pour. Itou.

[1] Marie-Claire Tonelotto-Hubert : Pour l’Europe, je dis NON à ce Traité constitutionnel (http://luxembourg.attac.org/argu_non.htm)

[2] Ben Fayot : Oui à la Constitution Européenne ! forum, n° 246, mai 2005

[3] Snobisme servant à indiquer la géométrie des placements relatifs contraires à l’intérieur d’un système composé par une charrue et par un ensemble ordonné de boeufs.

[4] En acquiescant l’existence du problème corollaire de la «  co-initiative ».

[5] Marie-Claire Tonelotto-Hubert : Pour l’Europe, je dis NON à ce Traité constitutionnel.

[6] Aux téméraires de représenter le texte tel quel deux mois après la prochaine élection présidentielle en utilisant l’argument qu’il a été adopté de la sorte en Espagne, à condition d’offrir une stratégie pour recoller les morceaux par après en vue d’un résultat décevant.

[7] Les points d) et e) du paragraphe 2. de l’article III-292 en illustrent probablement l’esprit en ce qui concerne leur domaine d’application.

[8] Ben Fayot : Oui à la Constitution Européenne !

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